Dans tous les pays, le développement et le fonctionnement des services urbains en réseaux, qu’il s’agisse de la distribution de l’eau, de l’énergie, du traitement des déchets, de l’assainissement, ou du transport de personnes et de biens, sont encadrés par les textes législatifs et réglementaires du ressort de l’État (lois, décrets, etc.) et/ou de collectivités territoriales (arrêtés, etc.) auxquels peuvent s’ajouter les chartes et conventions des secteurs professionnels, publics ou privés.
Mais cet arsenal législatif et réglementaire n’est pas exempt, à des degrés divers, des problématiques d’excès et insuffisances, de pertes de pertinence au fil des amendements, d’ancienneté et manques de synergie, d’absence d’anticipation face aux évolutions et projets impliquant de nouvelles règles.
Si par le passé les textes régissant un domaine d’activité pouvaient être globalement du ressort d’une seule entité (un ministère notamment), aujourd’hui le développement et le fonctionnement des services urbains en réseau associent des acteurs institutionnels et professionnels multiples.
Les réseaux de voirie et les systèmes de transport de personnes irriguent les villes et sont les vecteurs de la mobilité urbaine. Quels que soient les modes empruntés (marche à pied, déplacements motorisés individuels et collectifs), leur évolution tend vers plus d’offre, plus de sécurité, plus de qualité, mais également plus de complexité. Elle s’inscrit dans l’obligation faite à ces acteurs multiples d’actualiser les textes et d’en élargir le champ, notamment aux problématiques environnementales.
En conséquence, l’organisation et la gestion de la mobilité, initialement sous l’égide d’un seul acteur institutionnel, implique désormais d’autres acteurs dans des rôles, des fonctions et un cadre législatif et réglementaire en constante adaptation.
Comment compléter et actualiser l’arsenal législatif et réglementaire en vigueur ?
Tout projet modifiant notablement l’organisation du réseau, les modalités d’exploitation des lignes, les relations entre acteurs (institutionnels et professionnels), le volume et la qualité de l’offre, et bien sûr la sécurité, implique de compléter et actualiser l’arsenal législatif et réglementaire.
Le projet de renouvellement d’un parc de véhicules anciens, le plus souvent non conçus pour le transport urbain, par des autobus de nouvelle génération implique des mesures d’accompagnement particulières et la mise à niveau des textes réglementaires (y compris par de nouveaux textes). Les points développés ci-après illustrent ce besoin.
L’homologation du véhicule
Qu’est-ce que l’homologation d’un véhicule ?
L’homologation d’un véhicule est l’acte par lequel l’autorité administrative (l’État), atteste de la conformité du véhicule aux exigences techniques et sécuritaires définies par la loi. L’acquisition d’autobus de nouvelle génération remplaçant un parc de véhicules d’occasion anciens, sans vocation initiale au transport de voyageurs, doit automatiquement générer une refonte complète du cadre réglementaire.
Première étape – L’homologation traduit les critères retenus par la loi pour la qualité requise des véhicules
L’homologation traduira les obligations faites aux transporteurs de n’acquérir désormais que des véhicules satisfaisant aux critères retenus par la loi, notamment quant à la sécurité des voyageurs, des équipages et des autres utilisateurs de la voirie. Il en sera de même pour les normes afférentes à la protection de l’environnement (motorisation, chaîne cinématique, … se référant à la norme européenne notamment).
Est-ce que les véhicules que j’utilise sont homologués ?
NON/EN COURS/OUI
Sur quelles bases refondre et/ou actualiser les textes ouvrant à l’homologation ? Par référence au cahier des charges technique du nouveau véhicule ; sa validation par les services de l’État attestant de sa conformité aux politiques et orientations de niveau national en matière de renforcement de la sécurité routière, de développement durable et de fonctionnement de la ville. La rédaction de nouveaux textes se substituant en tout ou partie aux règlements antérieurs s’inscrit donc nécessairement dans un processus itératif, associant les ministères concernés, sous l’égide du ministère en charge des transports et de la circulation.
Seconde étape – La licence d’exploitation
Après l’homologation, qui s’attache au type et aux caractéristiques du véhicule, viennent sa réception et la délivrance du certificat d’immatriculation qui autorise la circulation sur voirie. L’autorisation d’exploiter le véhicule sur une ligne de transport urbain (suburbain ou régional) relève de la procédure d’octroi de licence d’exploitation par l’entité ayant qualité d’autorité organisatrice.
L’autorisation d’exploiter
L’autorisation d’exploiter, ou licence d’exploitation, est délivrée par l’Autorité publique en charge de l’organisation et du développement des services du transport de personnes pour une agglomération, une ville, des dessertes régionales ou des lignes de niveau national.
En règle générale la licence d’exploitation :
• est attribuée à un organisme professionnel de transport légalement constitué1 (coopérative, société, entreprise individuelle) candidat à l’exploitation d’un service de transport en commun de personnes sur une ligne définie ; l’opérateur ne peut se prévaloir de cette licence pour produire un service sur une autre ligne, sauf validation préalable de ce transfert par l’Autorité publique ;
• oblige la présentation à l’Autorité publique de tout document attestant de la qualité, de la compétence et de la probité de l’opérateur ;
• oblige l’opérateur à la signature du cahier des charges d’exploitation de la ligne pour laquelle la licence lui est attribuée ; cette signature vaut acceptation des contrôles d’exécution de ce cahier des charges et des sanctions encourues en cas d’inobservation ;
• engage l’opérateur au respect des textes législatifs et réglementaires en vigueur en matière de transport de personnes ;
• est accordée pour une durée limitée et peut être renouvelée à fin de validité (sous condition de respect par l’opérateur des obligations liées à la licence accordée pour la période écoulée).
Est-ce que les véhicules que j’utilise disposent d’une licence d’exploitation ?
NON/EN COURS/OUI
En quoi l’acquisition de véhicules neufs de nouvelle génération2 peut-elle nécessiter l’adaptation de textes réglementaires quant à la licence d’exploitation ?
Il s’agira notamment de :
• préciser, si besoin est, que l’attributaire de la licence d’exploitation est l’opérateur (et non le véhicule), que cette attribution est gratuite (hormis frais administratifs) et qu’à fin de validité ou à cessation d’activité de l’opérateur, la licence doit être restituée à l’Autorité publique sans pouvoir prétendre à compensation financière3 ,
• prendre en compte le coût d’acquisition d’un véhicule neuf par :
– l’allongement de la première période de validité de la licence afin qu’elle soit au moins égale à la période d’amortissement de l’emprunt contracté par l’opérateur (sans déroger toutefois à la durée de base en cas de manquement aux obligations de respect des cahiers des charges d’exploitation et autres textes),
– l’intégration de mesures d’accompagnement éventuellement prises par l’État pour faciliter l’investissement de renouvellement du parc (cf. des mesures fiscales au bénéfice de l’opérateur par exemple).
Le cahier des charges d’exploitation
Qu’est-ce que le cahier des charges ?
Le cahier des charges d’exploitation d’une desserte par un transport en commun de personnes est un texte d’État articulé en deux parties : d’une part des Clauses Générales de portée nationale, d’autre part des Clauses Particulières liées au niveau de la desserte (urbaine et suburbaine, régionale4, nationale).
Les Clauses Générales s’imposent dans les mêmes termes à tous les opérateurs.
Les Clauses Particulières définissent les caractéristiques d’une ligne (itinéraire, terminus, arrêts…) et les modalités de son exploitation (type de véhicule, amplitude quotidienne du service, fréquences, etc).
Le cahier des charges d’exploitation revêt la forme d’un contrat signé entre l’Autorité publique en charge de l’organisation et du développement des transports de personnes et l’opérateur retenu pour son exploitation.
Les Clauses Générales et Particulières du cahier des charges devront être adaptées en conséquence, actant notamment des nouvelles dispositions quant à la durée de conduite journalière maximale du conducteur.
Intérêts de l’introduction de véhicules de nouvelle génération :
L’introduction de véhicules de nouvelle génération est génératrice de progrès quant à l’organisation de l’exploitation, aux conditions de travail, à la sécurité des personnels et des voyageurs, à l’image des transports en commun. C’est à ce titre qu’elle peut être assortie de mesures d’accompagnement, notamment financières, décidées par les pouvoirs publics : baisse des frais de douane à l’importation, report du paiement de la TVA, prime de l’État, garantie de l’État pour les emprunts réalisés, etc.
Pour exemple :
Le renouvellement du parc d’une ligne saturée (trop de petits véhicules, renfort de l’offre impossible, demande non satisfaite) par des véhicules modernes plus capacitaires permet :
– un volume d’offre accru, y compris en réduisant le nombre de véhicules en ligne pour « dé-saturer » l’exploitation ;
– un élargissement de l’amplitude du service aux plages horaires où la demande ne pouvait être satisfaite ;
– une organisation de l’exploitation en deux services couvrant toute l’amplitude au lieu d’un seul donc la réduction du temps de conduite par service, et de meilleures conditions de travail et de sécurité, la création d’emplois.
Une nécessité de mettre à jour les compétences
Le renouvellement progressif par une gamme de véhicules de nouvelle génération doit être générateur d’évolution des métiers, notamment ceux de l’exploitation.
Pour exemple : une refonte conjointe du système tarifaire externalisant la vente des titres de transport peut ainsi transformer le receveur en contrôleur de la validation des billets.
Des compétences répondant à de nouveaux métiers devront donc être acquises par les personnels. Mais le besoin de renforcements touche également les métiers actuels.
Pour exemple : les conducteurs qui constituent l’effectif principal sont concernés : être titulaire d’un permis de conduire ne suffit pas à transporter des passagers dans les meilleures conditions de confort et de sécurité. Et pour ceux qui auraient reçu une formation initiale, la pratique quotidienne tend souvent à s’éloigner des acquis.
L’homologation de nouveaux véhicules est, pour les pouvoirs publics, l’opportunité de renforcements des compétences des personnels en place (formation continue) et de nouvelles dispositions d’accès aux métiers du transport de personnes (formation initiale). Les niveaux de qualifications exigés et la reconnaissance des compétences acquises, concrétisés par la délivrance d’un permis de conduire spécifique « transport de voyageurs », ne peuvent que valoriser les intéressés et renforcer l’image de la profession.
La conception et la mise en œuvre pérenne de telles mesures d’accompagnement associent divers acteurs institutionnels (notamment les services de l’État chargés du transport, de la sécurité routière, de la formation professionnelle…) ; il leur revient de faire progresser les textes en conséquence et d’engager les programmes de formation correspondants en concertation avec la profession.
Assurer la maintenance et le contrôle technique
Les opérations de contrôle et de maintenance de véhicules neufs sont programmées par le carnet d’entretien ; le constructeur les assume durant la période de garantie. Aux pratiques de maintenance corrective « artisanale » doit se substituer une maintenance prédictive minimisant les risques de pannes et autres défaillances techniques sur voirie. Ces nouvelles pratiques doivent assurer le maximum de disponibilité et de sécurité pour l’exploitation quotidienne.
À lui seul, cet enjeu « sécurité » justifie que les textes réglementaires intègrent l’obligation faite à l’exploitant de se conformer aux dispositions du carnet d’entretien. Ce dernier, dûment rempli après chaque intervention sur le véhicule, peut être demandé par les forces de l’ordre en cas d’accident et doit être présenté lors des visites périodiques de contrôle technique. Les conséquences du non-respect des maintenances programmées sont à préciser par un régime de sanctions défini par les textes.
Le renforcement du contrôle technique périodique est également préconisé. S’il doit intégrer de nouvelles normes et obligations touchant en particulier les organes de sécurité et les émissions polluantes, il doit également s’appliquer à la carrosserie et aux équipements intérieurs afin que soient contrôlés les dégradations, manques de propreté et de salubrité, vieillissement excessif, etc., significatifs d’entretien insuffisant.
Les textes seraient donc à compléter en ce sens.