Les stratégies de mobilisation des financements dépendent de la position/fonction de l’acheteur potentiel. Financements sur fonds propres, appel à des bailleurs de fonds, partenariats publics-privés, etc. sont autant de possibilités de financements dont se saisiront acteurs privés, acteurs publics locaux et nationaux.
Il s’agira donc de voir comment il est possible de mobiliser des financements à travers trois stratégies :
• sur fonds propres
• en faisant appel aux pouvoirs publics
• en empruntant
Le financement sur fonds propres
Lorsqu’un acteur souhaite réaliser un projet d’acquisition des bus, il peut choisir de s’appuyer sur fonds propres. Si l’on se positionne comme acteur privé de la mobilité, les fonds propres, aussi appelés capitaux propres, sont, en comptabilité, les ressources (passif) d’une société qui appartiennent à ses actionnaires, par opposition aux dettes vis-à-vis des fournisseurs ou des banques par exemple. Cette accumulation des fonds est généralement le fruit de profits réalisés les années précédentes (via la vente de tickets de bus notamment). Pour les acteurs publics, les fonds propres destinés à la mobilité proviennent principalement des impôts et/ou des taxes prélevés.
Néanmoins, un endettement peut être nécessaire car l’acquisition de nouveaux bus a souvent un coût trop élevé pour qu’une collectivité locale puisse prendre en charge l’entièreté de l’investissement sur fonds propres. En effet, la croissance de la mobilité, résultant de la croissance démographique et de l’expansion spatiale des collectivités, se traduit par une sollicitation de plus en plus forte des finances publiques pour répondre aux besoins d’investissement et aux déficits d’exploitation.
Le financement de l’investissement par les pouvoirs publics
Les pouvoirs publics, contributeurs majeurs au financement du transport urbain en investissement :
Sur l’ensemble des continents, les pouvoirs publics représentent l’un des contributeurs essentiels au financement du transport urbain en investissement. Les obligations de services publics, généralement liées à la mise à disposition de moyens de transport pour toute la population, justifient ce mode de financement.
Souvent, aucune ressource n’est a priori affectée au transport urbain et c’est un choix politique et budgétaire qui décidera des montants octroyés. Les budgets publics étant soumis à l’annualité budgétaire, le transport urbain peut être tributaire d’arbitrages en sa défaveur. Les projets de transport urbain étant placés sous le signe du long terme, les modes de financement dont le produit est affecté au « budget transport urbain » peuvent apporter une plus grande pérennité1.
Les mécanismes de financement de l’investissement public :
Avec l’émergence des politiques de décentralisation qui ont fait apparaître de nouveaux acteurs aux niveaux régional et local, le financement public devient multiforme avec l’intervention de plus en plus importante des collectivités locales et des banques nationales de développement. Cette variété des sources peut être un facteur d’augmentation des fonds affectés aux transports mais comporte des risques de perte de cohérence et d’efficacité des investissements. L’institution d’une autorité organisatrice des transports (à l’exemple du Conseil Exécutif des Transports Urbains de Dakar (CETUD)] permet de canaliser l’ensemble des ressources vers des objectifs planifiés à moyen et long terme et d’avoir recours à des emprunts bancaires et auprès des bailleurs de fonds en offrant la garantie d’une structure stable.
Quelques mécanismes possibles de financement public des investissements :
• les usagers payent des taxes sur les produits pétroliers qui vont vers les budgets publics nationaux ou décentralisés dédiés au transport urbain ;
• les péages ;
• le bénéfice d’exploitation réinvesti ;
• les employeurs versent une taxe ;
• les contribuables payent des impôts ;
• l’emprunt auprès d’institutions nationales ou internationales ;
• le reversement d’une part de la plus-value foncière acquise grâce à l’infrastructure de transport selon diverses modalités ;
• le budget propre des pouvoirs publics.
On voit donc que les pouvoirs publics, ayant besoins de sources complémentaires pour pouvoir investir dans des projets de transports urbains souvent très coûteux (parmi lesquels l’acquisition d’une nouvelle flotte de bus), font appel à d’autres institutions. Les possibilités de financement public ne parvenant pas à suivre l’évolution de la demande, il est essentiel d’envisager le recours à d’autres sources de financement.
Emprunter pour financer l’acquisition de nouveaux bus
Les emprunts et garanties représentent un sujet sensible qu’il convient d’étudier avec attention car ils sont décisifs dans la construction d’un montage financier propre à l’acquisition des bus. Deux formes de recours à l’emprunt existent : par les banques ou via les bailleurs de fonds.
Le soutien des bailleurs de fonds :
Dans le secteur des transports publics dans les pays en développement, les bailleurs de fonds ont un rôle majeur. Chaque bailleur concentre ses efforts sur certaines dimensions en fonction de son expertise propre et du type d’instruments disponibles. Ceux qui travaillent principalement en subventions (US Agency for International Development – USAID –, Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit – GIZ – et Department for International Development – DFID) ont tendance à favoriser les interventions d’assistance technique tandis que les bailleurs qui travaillent principalement en prêts, par exemple la KFW (KreditanstaltfürWiederaufbau), soutiennent les institutions financières pour l’élargissement de leurs gammes de produits2.
Le FMDV propose à ce titre une formation en ligne sur le financement d’infrastructures.
L’intervention de partenaires financiers nationaux et internationaux :
À l’échelle internationale, les banques multilatérales et l’aide publique bilatérale financent des investissements dans les systèmes de transport. Leur intervention n’est pas limitée à un prêt financier, et peut prendre plusieurs formes3 :
Les dons : ils sont le plus souvent affectés à des études ou des appuis institutionnels visant à améliorer la conception et la gestion des systèmes de transports.
Les prêts dits concessionnels : c’est-à-dire des prêts qui peuvent avoir des conditions privilégiées par rapport aux prêts bancaires en termes de : durée, taux d’intérêt, période de grâce (délai accordé avant le premier remboursement qui correspond en général à la période précédant l’exploitation de l’ouvrage). Les conditions de ces prêts diffèrent en fonction de la situation économique des pays, le traitement le plus favorable étant accordé aux pays les moins avancés.
Les prêts déliés : dans le cadre de l’Aide Publique au Développement bilatérale, un accord a été entériné par les pays donateurs afin d’éviter que cette aide puisse induire des distorsions de concurrence entre les pays. Les prêts et dons peuvent être assortis de conditions quant à l’utilisation des fonds.
Néanmoins, pour que les projets de renouvellement du parc d’autobus aboutissent, il s’agit de s’assurer un accès à l’emprunt en gagnant la confiance des prêteurs. C’est grâce à la crédibilité financière assurée par une gestion saine des comptes financiers que les prêteurs auront les garanties suffisantes pour qu’ils investissent dans de tels projets. Si s’endetter peut s’avérer risqué, un emprunt qui sera minutieusement géré peut révéler un nouveau potentiel. Qui dit emprunt dit endettement. Dès lors, comment gérer activement sa dette ?
Comment gérer activement sa dette ?
Pouvant se révéler très lourd, l’encours d’emprunts doit être géré au plus près et renégocié dans la mesure du possible en fonction de l’évolution des taux d’intérêt. Sur les montants en jeu, les gains peuvent se révéler importants. Or les dirigeants des collectivités locales emprunteuses n’ont pas toujours cette préoccupation en tête ni à disposition un personnel qualifié pour le faire4.
La gestion active de la dette se définit par la capacité de la collectivité d’adapter et de faire évoluer son encours afin de minimiser, à chaque instant, les frais financiers de l’établissement. Le guide CODATU « Qui paie quoi ? » identifie plusieurs stratégies de réduction des charges financières pour une gestion active de la dette sont énoncées :
Analyser la structure de sa dette actuelle : élaborer les principaux indicateurs (taux moyen pondéré, durée, vie moyenne) ; construire des tableaux de bord de son encours de dette et produits structurés ; identifier ses marges de manœuvre.
Profiter des opportunités sur sa dette actuelle : être réactif par rapport aux opportunités du marché pour effectuer des arbitrages pertinents ; évaluer la pertinence de ses options de renégociation ; simuler les pénalités forfaitaires, le taux d’équilibre, l’indemnité actuarielle, le taux de réemploi…
Minimiser sa dette future : choisir entre le financement intermédié et désintermédié ; définir ses critères de choix et préparer la consultation ; comparer les offres bancaires grâce au principe d’actualisation, appréhender les produits structurés.
Par conséquent, l’information en flux tendu est indispensable afin de suivre l’évolution permanente des marchés, de l’offre bancaire, de la situation financière de sa structure et de l’évolution législative et réglementaire.
Recourir aux partenariats public-privé (PPP) pour son projet d’acquisition des bus, une forme inédite de financement
L’objectif d’un partenariat public-privé est d’impliquer le secteur privé dans l’investissement initial et/ou l’exploitation d’un projet en lui confiant une partie des tâches et en lui faisant supporter une partie des risques liés à ce projet, tout en lui garantissant un dispositif suffisamment rentable (avec subvention du secteur public si besoin est) pour qu’il soit intéressé5.
Les partenariats public-privé ne constituent pas à proprement parler une nouvelle ressource financière. Ils permettent en réalité de mobiliser le secteur privé pour porter temporairement la charge financière, qu’elle soit d’investissement ou de fonctionnement. Le principe général est que le partenaire privé recouvre progressivement ses frais, soit en percevant un remboursement de la part de la puissance publique, soit en percevant une redevance de la part de l’utilisateur du service et/ou de l’infrastructure.
Comme précisé dans le guide CODATU : « Un partenariat public-privé peut permettre un apport de fonds au service d’un projet au même titre qu’un emprunt, mais en engageant le prêteur (le partenaire privé) et en le responsabilisant pour la bonne marche du projet. Au bout du compte, le véritable financement sera apporté par les usagers et/ou le secteur public à travers le paiement du titre de transport et/ou la rémunération du partenaire privé, qui aura à charge le remboursement de ses emprunts. ».6
- Source : AFD et CODATU : Guide de bonnes pratiques : Qui paie quoi en matière de transport urbain ? (édition 2014) – Chapitre 2 : Les contributeurs au budget public du transport urbain p. 25
- Un rapport co-rédigé par le FMDV (Fonds Mondiale pour le Développement des Villes), le CCFLA (Cities Climate Finance Leadership Alliance), et le programme pour l’environnement des Nations Unies répertorie sur une carte du monde les différents bailleurs de fonds mobilisables pour le climat ; ce qui permet d’avoir un aperçu assez large des différentes sources de financement potentielles.
- Source : AFD et CODATU : Guide de bonnes pratiques : Qui paie quoi en matière de transport urbain ? (édition 2014) – Chapitre 2 : Les contributeurs au budget public du transport urbain p. 30
- Source : AFD et CODATU : Guide de bonnes pratiques : Qui paie quoi en matière de transport urbain ? (édition 2014) p. 32
- Source : AFD et CODATU : Guide de bonnes pratiques : Qui paie quoi en matière de transport urbain ? (édition 2014) – Chapitre 7 : Le recours au Partenariat Public-Privé p. 111
- Source : CODATU : Guide de bonnes pratiques : Qui paie quoi en matière de transport urbain ? (édition 2014) – Chapitre 7 : Le recours au Partenariat Public-Privé p. 115